Des histoires mal commencées qui finissent bien

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Pour certaines arrivées particulièrement pitoyables, il faut faire très vite. C’est ainsi, par exemple, que nous avons récemment fait procéder, trois fois de suite en fort peu de temps, à l’amputation d’un membre antérieur pour trois chats : ces trois malheureuses bêtes nous ont été apportées avec un membre sectionné ou écrasé. On n’ose imaginer la souffrance subie. L’un d’eux a « traîné » longtemps avant de nous être apporté et ce sont les vers qui infestaient la plaie et la nettoyaient qui, d’après le vétérinaire, ont permis que le chat puisse être sauvé… L’un d’eux a été adopté. Les deux autres, adorables et surmontant fort bien leur handicap, attendent un maître au refuge…

Quelques scènes de la vie quotidienne, choisies au hasard de ma mémoire :
Un homme est arrivé au refuge, il y a quelques mois, en fin d’après-midi, portant, dans un carton, quelque chose qui ressemblait vaguement à un croisement d’o’cédar très sale et de serpillière, mâtiné de boa 1930. Il a fallu presqu’une minute à la secrétaire pour comprendre que la chose informe, puante et inerte déposée dans le carton était un chien, et ensuite elle le crut mort. Erreur : c’était une chienne shitzu, quasiment mourante, âgée, déshydratée, décharnée, aveugle, sans forces, couverte de plaies, que l’homme venait de ramasser sur une route, près de Pontailler… Elle s’appelle Bénédicte, est âgée d’environ 13 ans, et se porte à merveille si on excepte une quasi cécité due à une kératite bilatérale et une petite maladie de peau sous contrôle. Le refuge lui a rendu sa dignité ; maintenant, elle ressemble… à un chien et, gaie comme un pinson, elle attend un bon maître…

Bénédicte

Une très jeune chatte, jolie et câline, est abandonnée par sa maîtresse, qui prétend l’avoir trouvée, mais la secrétaire n’est pas dupe… La chatte saigne et se gratte. « Pourquoi ne pas la faire soigner, au lieu de nous l’apporter ? ». D’avance, la secrétaire connaissait la réponse : « Quoi ? un chat chez le vétérinaire ? Je n’ai pas d’argent pour çà… » Dans ces cas-là, on demande à l’abandonneur de s’engager par écrit à ne pas reprendre d’animal. Mais que valent, dans la société actuelle, la parole et la signature de certains ? Colombe -c’est le nom que nous avons donné à la jeune chatte- est atteinte d’une allergie alimentaire. Une piqûre de cortisone, un antibiotique, un régime spécial (poulet, poisson, thon au naturel et veau) et voilà la petite heureuse et en pleine forme, prête à partir pour une nouvelle vie, mais une vraie vie cette fois, avec une vraie maîtresse…

On explique à cet homme qu’il serait cruel d’abandonner -en plein hiver de surcroît, alors que nos boxes ne sont pas chauffés- son berger allemand âgé de 10 ans et très attaché à son maître. L’homme prend prétexte d’un déménagement. On tente de lui expliquer que le chien le suivra sans problème, qu’il s’adaptera à n’importe quel logement et que l’essentiel, pour lui, est de rester avec son maître. L’homme demande alors à ce que nous prenions son chien en pension, le temps pour lui d’effectuer le déménagement. Cette chanson-là aussi, nous la connaissons bien, et dès cet instant nous avons su que l’homme ne reviendrait pas… Le chien aussi savait : cela se lisait dans son regard, et son attitude résignée fendait le cœur…

Je viens d’évoquer pour vous quelques histoires de bêtes, afin que vous puissiez prendre la mesure de la détresse et de la misère animales mais aussi de l’importance du rôle de chacun d’entre nous lorsqu’il s’agit de les combattre. Cependant, il ne faut pas oublier qu’à côté de ces animaux particulièrement malchanceux, vivent au refuge, en attente d’adoptants, des cohortes de bêtes jeunes, jolies, câlines, en pleine santé…

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